Progressivement la financiarisation et l’industrialisation de la Santé gangrènent le système de soin de notre pays.
Chère à nos dirigeants et déclinée depuis des décennies pour être le bon élève de l’UE, la politique de maîtrise de « la dépense publique » a généré depuis la pandémie des retards de soins considérables. On observe une surmortalité de la population en 2022 par rapport aux années précédentes et un recul de l’espérance de vie en bonne santé à 65 ans.
De réduction de postes en réduction de postes, d’intensification du travail par la rentabilisation des tâches effectuées, les personnels soignants sont extenués et le recrutement en pâtit.
Nous sommes aux antipodes des envolées « macroniennes » de mars 2020 : « La santé gratuite sans conditions de revenus, de parcours ou de professions, notre Etat providence ne sont pas des coûts ou des charges, mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe ».
La médecine libérale, dont la vocation est d’être la médecine de premier recours, la pierre angulaire d’un service public de la médecine de proximité, est plongée dans une crise existentielle avec l’extension des déserts médicaux, y compris en zone urbaine, une baisse du nombre de généralistes.
Cela du fait de départs à la retraite non remplacés, des réformes successives visant à limiter le nombre de médecins, de l’autorisation de dépassements d’honoraires faisant sortir du champ des soins la population la plus démunie (en augmentation constante) et la suppression des obligations à participer à la permanence des soins.
La nature a horreur du vide surtout quand celui-ci est organisé, planifié par les pouvoirs publics. Les vautours de la finance se penchent avec délectation sur la dépouille de notre système de santé. Le président d ‘Edmond de Rothschild Corporate Finance constate « un véritable engouement du capital-investissement pour la santé en France ».
Tourné jusqu’à présent vers les cliniques, la radiologie ou la biologie médicale, ils jettent leur dévolu sur les soins « primaires ». Ces nouveaux acteurs, comme Ramsay Health Care, société australienne cotée en bourse et aux buts très lucratifs, développent les structures dites « Centres Médicaux de Soins Immédiats » à Lyon, Poitiers…
Elles sont d’une part favorisée par les pouvoirs publics et alléchées par la manne de la sécurité sociale (640 milliards d’euros), sa solvabilité. De plus en France avec 220 milliards de dépenses de santé, le filon s’avère prodigieux pour ces rapaces. Dans ces centres 30% d’examens effectués n’ont aucune utilité.
La financiarisation décuple les inégalités parce que le capital ne s’investit que là où c’est rentable et parce que là où il est investi, les patients sont amenés à payer un surcoût non remboursable, déclare l’économiste Nicolas Da Silva.
Arnaud Wiehn, chargé de mission à l’Instance Régionale d’Education et de Promotion de la Santé (IREPS) a salué le courage de notre municipalité de prendre à bras le corps ce dossier emblématique, innovant en matière de santé.
Le Centre Communal de Santé se veut une réponse moderne et adaptée à de nouveaux besoins, qui replace l’être humain au centre du projet politique.
C’est l’esprit et la lettre de la délibération portée par Francis Royer, adjoint au maire en charge de ce dossier, lors du conseil municipal du 07/02/2024 :
« Permettez-moi tout d’abord d’exprimer toute la fierté que j’ai eue à voir cette salle Antonin Larroque remplie, attentive et passionnée lors des deux débats, preuve que la santé et ses évolutions constituent une préoccupation majeure de nos concitoyens. Quelle fierté et richesse pour notre commune de pouvoir assister à ces échanges qui ont collectivement défini les contours de cette médecine du XXIème siècle que nous attendons : centrée sur la personne malade et non sur la maladie, libérée des contraintes de temps ou de rentabilité, orientée sur l’éducation thérapeutique du patient et la prévention (…)
Cynthia Fleury, psychanalyste, philosophe, membre du conseil consultatif national d’éthique, mais aussi chroniqueuse hebdomadaire dans cet excellent quotidien qu’est l’HUMANITE, est titulaire de la chaire de philosophie à l’hôpital et à ce titre a lancé la première chaire de médecine narrative de France au CHU de Bordeaux.
Elle entend replacer le récit du patient au cœur du processus de soin et plus globalement remettre le sujet au cœur du collectif, parce que, je la cite : « le souci de soi et le souci de la cité sont intimement liés ». Cynthia Fleury porte donc cette attention première à la dignité de la personne comme préalable à toute chose ».
(Lire l’intégralité de son intervention sur notre site pcfjallesmedoc.org).
En bon apôtre de la médecine libérale, nous aurions apprécié que Jacques Mangon mette toute sa ferveur à porter la contradiction, lors de l’inauguration du Centre Communal de Santé, à André Grimaldi, professeur émérite à la Pitié Salpêtrière ou à Hélène Colombani, présidente de la Fédération Nationale des Centres de Santé. Hélas il n’était pas là ! Quant à ses comparses de droite, ils ont été insignifiants. Ils avaient choisi une autre option : faire du bruit au conseil municipal du lendemain.
Dommage…
Photo principale : « la colonne brisée » de Frida Khalo, 1944, 40 x 30,7 cm
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