Le journaliste de 20 minutes qui couvrait le second meeting de Léon Deffontaines au gymnase JAPY à Paris qui a rassemblé 1500 personnes, a, semble-il, du mal à distinguer la ligne du PCF de celle de la France Insoumise, si ce n’est sur le nucléaire : « Si le PCF est le refuge de l’électorat de gauche qui veut du nucléaire –la différence de fond la plus notable-ce sera peut-être un peu court. » Vraiment ?
Pourtant il s’agit d’une question fondamentale quand l’Europe dépend corps et âme de 55% des importation de gaz et de pétrole. Les USA, dont la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie (vite détournées) ont permis d’imposer sur le marché européen leur gaz et leur pétrole de schiste liquéfiés à des prix prohibitifs, en sont les grands gagnants « le coût à court terme de la réduction de la dépendance énergétique de l’UE vis-à-vis de la Russie pourrait s’élever à 100 milliards d’euros » selon l’économiste Jean Pisani-Ferry. De fait, l’UE se trouve pris en tenaille entre les USA et la Russie tout deux autonomes énergétiquement.
Pour Samia Jaber, porte-parole du mouvement l’Engagement créé par A. Montebourg, sa présence sur la liste de Léon Deffontaines se justifie par une volonté de « construire une souveraineté industrielle, alimentaire et sanitaire en Europe. »
Comment répondre à cet objectif ?
Sûrement pas en préconisant l’arrêt total du nucléaire civil au prétexte que ce serait un gouffre financier ou que la gestion des déchets pose une question majeure.
Le développement des énergies renouvelables ne peut répondre à lui seul à cet enjeu.
Certes la France avec 20% est à la traîne par rapport au reste de l’UE, mais à l’instar de l’Allemagne, ce développement a contribué à relancer l’exploitation des énergies fossiles et met à mal la lutte contre le réchauffement climatique.
Le capitalisme libéral, afin de livrer aux spéculateurs le marché de l’énergie, a organisé une fronde en mettant en opposition les énergies renouvelables électriques et nucléaires.
Le modèle énergétique français et EDF en sont fragilisés, dans l’incapacité d’anticiper la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires et leur renouvellement, entraînant une perte de compétence. L’aptitude à se relancer dans un chantier d’envergure s’en trouve réduite. La filière industrielle d’énergies renouvelables est au ralenti voire en panne.
En aucun cas les communistes ne peuvent cautionner de tels renoncements qui ont conduit à la mise au rancard de la recherche.
Ainsi l’arrêt en 1997 sur la pression des verts de droite et de gauche (D. Voynet, C.Lepage), sous le gouvernement de L.Jospin, du réacteur Superphénix est une faute grave. Cette technologie consistait à utiliser les déchets nucléaires de nos centrales en activité. On disposait de deux à trois mille ans de souveraineté énergétique avec la matière sur le sol français.
Après avoir acté la reprise des travaux sur les réacteurs à neutron rapide -les surgénérateurs – le projet Astrid, qui utilise les déchets a été abandonné en 2019 par E.Macron. Son aboutissement pouvait nous assurer notre souveraineté énergétique, avoir de l’électricité en abondance, et aurait réglé nos problèmes de facture. Cette technologie a fait le bonheur de Bill Gates qui a obtenu des aides d’Etat américaines pour développer une technologie équivalente. Les Russes ne sont pas en reste. Rosatom, entreprise publique, a construit deux réacteurs à neutrons rapides.
Nous avions 30 ans d’avance sur le monde et aujourd’hui les USA et la Russie ont l’indépendance énergétique.
Ce n’est pas le seul domaine où nous avons une approche différente avec LFI et les autres composantes de gauche.
Chacun s’accorde sur le nécessaire retour à la nation de fleurons essentiels que ce soit dans l’industrie, la banque ou les services.
Mais avec quel contenu ?
Les nationalisations et la loi de démocratisation du secteur public et nationalisé de 1983, octroyait l’élection par les salariés de 1/3 des membres du conseil d’administration mais ne leur accordait aucun pouvoir sur les choix stratégiques, sur les choix sociaux (emplois, salaires formations…), les choix financiers (distribution des dividendes, emprunts, placements financier…)
Ce qui permit aux tenants du capital de piller ces entreprises via le transfert de fond vers des filiales de droits privé en France ou à l’étranger.
Sans pouvoirs citoyens permettant d’agir sur les choix stratégiques, sur l’utilisation de l’argent, celui des banques, des profits, il est illusoire de croire à la philanthropie des puissances d’argent pour produire autrement, respecter l’environnement.
Comme le si bien dit Carlos Tavares : « pourquoi me gêner puisque aucune loi me contraint ? ». Pour ne citer qu’une des questions sur laquelle la crédibilité de la gauche est engagée. Elle ne peut pas évacuer ce débat d’idées sur le fond, afin que les citoyens, les salariés aient, en s’emparant de ces idées, en se mobilisant, en les mettant au cœur de leurs luttes, l’ambition de la maîtrise de leur avenir. Bref de reprendre la main.
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